Dans une décision du 22 juillet 2022, le Conseil d'Etat pose le principe selon lequel l’obligation pour le responsable de traitement de notifier la CNIL (article 33 RGPD) en cas de violation ne s’impose pas quand « la CNIL l'a elle-même informé de cette violation et a engagé son contrôle sur la base des informations portées à sa connaissance... »
Dans l'affaire en question, la CNIL avait procédé en 2019 à des contrôles en ligne à la suite de signalements faisant état de serveurs informatiques d'imageries médicales librement accessibles en ligne.
Un médecin sera avisé que les images médicales ainsi que les noms et prénoms de ses patients sont accessibles à partir de l'adresse IP de son serveur, non protégée.
Il sera sanctionné le 7 décembre 2020 d'une amende de 3 000 euros par une délibération de la formation restreinte de la CNIL, pour manquement à l'obligation de sécuriser le traitement, et manquement à son obligation de notifier la CNIL de la violation (article 32 et 33 RGPD)
Le médecin a formé un recours devant le Conseil d'Etat.
Sur le manquement à l'obligation d'assurer la sécurité des données traitées
Le manquement à l'obligation de sécurité résulte de deux erreurs du responsable de traitement :
D'une part, il n'a pas procédé au chiffrement des données médicales disponibles sur son disque dur externe
D'autre part, il a réalisé lui-même une installation défaillante de son réseau, en ouvrant les ports de sa box internet pour faire fonctionner son VPN. Il aurait dû limiter les flux réseau au strict nécessaire.
Sur ce point, le Conseil d'Etat affirme que la CNIL n'a pas fait une inexacte application de l'article 32 du RGPD, le traitement de Données sensibles exigeant une attention particulière concernant les Mesures de sécurité mises en place.
Sur le manquement à l'obligation d'informer la CNIL de la violation
La CNIL reproche au médecin de ne pas l'avoir notifiée de la violation quand bien même elle en connaissait l'existence par le biais de l'enquête et avait informé ce dernier de la violation.
Pour elle, le responsable de traitement n'est pas déchargé de son obligation de notification car il pourrait apporter des éléments complémentaires à l'enquête.
Le Conseil d'Etat va lui considérer que le responsable de traitement est bien déchargé de cette obligation de notification lorsque la CNIL a déjà eu connaissance de la violation par le biais d'une enquête.
Il réduit donc le montant de la sanction imposée au médecin à 2 500 euros.
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Quid de la portée de la décision ?
En décembre 2020, un autre médecin avait été sanctionné pour des motifs similaires (voir notre article détaillé ici)
On se demande toutefois si l'absence de nécessité d'une notification à la CNIL dans ce cas peut s'étendre de manière globale à tous les cas où l'autorité de contrôle enquête et informe le responsable de traitement de la violation.
En effet, cette absence d'obligation est peut être strictement limitée au cas où la CNIL dispose déjà de toutes les informations listées à l'article 33.3. Dans les autres cas, le responsable de traitement serait peut être tenu d'apporter le reste des informations par le biais d'une notification de violation.
Rien n'est moins sûr car le fondement de la décision du Conseil d'Etat est limité au 1 de l'article 33 du RGPD.